La négociation : Bargaining for advantage, de G. Richard Sell

La négociation selon Richard Sell

Thème : Négociations

Titre : Bargaining for advantage

Auteur : Richard Sell est professeur à la Wharton School, au sein de l’University of Pennsylvania. Il y enseigne le management et est le directeur d’un groupe de travail réputé et très demandé : le Wharton Executive Negociation Workshop. Il cite d’ailleurs en exemple quelques uns de ses adeptes qui en sont ressortis grandis et affrontent la négociation avec beaucoup plus de confiance. Bien entendu ce livre est une porte d’entrée à ce Workshop et c’est en quelques sortes une publicité indirecte. Mais on l’accepte car en contre partie Richard Sell nous y livre son expérience et ses astuces !

Richard Sell a été nommé trois fois dans la liste des meilleurs professeurs de management par le magazine renommé BusinessWeek. Reste donc à savoir ce que cette pointure peut nous apporter en moins de 250 pages… C’est parti !

Date de parution : paru pour la 1ère fois en 1999, le livre a subi quelques mises à jour, en particuliers pour se mettre à jour des moyens numériques actuels pouvant intervenir dans les négociations : les mails, les messageries instantanées,…

Nombre de pages : 236 pages + 2 annexes : 1 test/quizz pour découvrir le type de négociateur que l’on est et 1 guide des négociations bien menées

Temps de lecture : 11 heures

négociation
Adjugé, vendu !

L’idée en moins de 60 mots : Négocier ne fait pas tant appel au talent inné de baratineur vénéré par certains. La négociation repose sur des faits et des idées précises et une approche méthodique des relations humaines. La préparation est essentielle ; contexte, connaissance de ses forces/faiblesses, rapport de force, objectifs, éthique et bien sûr pièges à éviter : seul le travail mène au succès !

3 meilleures citations :

« Rater sa préparation c’est se préparer à rater. » Citation de John Wooden, entraîneur de basket célèbre de l’université UCLA

« Si vous traitez les gens de façon juste, ils vous traiteront justement – au moins 90% du temps. » Franklin Roosevelt

« En ayant confiance dans vos aptitudes à négocier, les obstacles deviendront des opportunités. »

Notes :

Facilité de lecture : 8/10 – version anglaise ; d’abord de la théorie – entrecoupée d’exemples – puis des méthodes pour progresser. Le raisonnement de l’auteur tient la route. Et son style est plutôt accessible. On sent la parole du professeur qui enseigne à ses élèves son enrichissement personnel.

Dans la tendance actuelle : 8/10 – on aura toujours besoin de négocier ! Cinéma ou resto ou les deux ? On a toujours besoin de sortir son talent de négociateur pour affronter les décisions qui nous arrivent en pleine face à tout moment de notre vie.

Pertinence / Originalité des idées développées : 6/10 – un peu de déception vu les critiques élogieuses trouvées sur le net au sujet de ce livre. L’essentiel est là, la base de la négociation est dévoilée et les grandes méthodes y sont décortiquées mais cela manque un peu de folie ! J’ai cependant été bien emballé par la fin et le sujet trop peu souvent abordé de l’éthique d’une négociation et le « comment faire beau et bien ».

Applicabilité des conseils : 7/10 – bien évidemment on peut mettre en pratique presque immédiatement le livre refermé et c’est d’ailleurs par là que passe la réussite. Les pièges à éviter sont bien détaillés. Il manque quand même les conseils en chair et en os d’un négociateur expert, notamment pour ce qui est de la communication non-verbale, des codes et langages du corps.

Note globale : 7,3/10

3 actions retenues :

  • La négociation demande du feeling, c’est sûr, mais avant tout une bonne préparation et en particulier un catalogue fourni de données sur la situation, les attentes et la psychologie des participants amènera des arguments de poids dans la balance. Il est indispensable d’étudier tous les points de vue, notamment celui adverse, pour comprendre quels sont les rapports de force et les leviers de manœuvre.
  • Etre bon joueur : gagner par tous les moyens n’est pas une voie envisageable. Il est toujours préférable de trouver un accord « gagnant-gagnant » que de remporter tous les « prix » sans laisser une miette à l’adversaire. Notre philosophie de négociation nous suit toute notre vie ! Pensons donc partenariat plutôt que affaire d’un jour, respect plutôt que coups bas.
  • L’entraînement c’est tous les jours ! Devenir un fin négociateur ne se fait pas d’un claquement de doigt, on passera par des découvertes, des échecs,…mais avant tout il faut considérer le quotidien comme un terrain de jeu : le choix du film au cinéma, la destination de nos prochaines vacances, la prime que l’on demande à son patron,…la négociation est partout alors notre chemin démarre dès aujourd’hui !

 

Synthèse : Comme on pourrait le rencontrer dans un bouquin académique, Richard Sell aborde la négociation en trois temps : la théorie, les méthodes et bonnes pratiques à adopter pour des négociations réussies et enfin les pièges à adopter et les valeurs d’un négociateur idéal.

Négocier : La théorie

Pour « gagner » une négociation ou même mieux que chacun en ressorte gagnant – le fameux « gagnant-gagnant » – quelques questions systématiques sont à se poser, à la manière d’une check-list à dérouler.

Quel est notre type dans le monde de la négociation ? Compétiteur, collaborateur, expert en compromis, maître dans l’art d’éviter tout conflit ou encore accommodant ? Evidemment c’est un peu de chacun de ces « fils » que notre cordage de négociation est tissé. A nous de déterminer avec précision qui nous sommes vraiment – et pas qui nous voulons être !

Un exercice amusant proposé dans ce livre consiste à trouver une solution au problème suivant : nous sommes assis autour d’une table circulaire avec une dizaine d’autre personnes, tous en face à face (avec une autre personne). Le but est d’arriver à faire se déplacer la personne en face de nous derrière notre chaise ; tous les moyens sont autorisés ! Les 2 premières personnes qui arriveront dans cette configuration remportent 500€. Comment procédez-vous ? N’hésitez-pas à partager vos propositions en commentaire.

Dans quel contexte nous situons-nous ? Cela comprend les enjeux de la négociation à venir, les délais exigés, les ressources à notre disposition, la culture des protagonistes (on ne négocie pas de la même manière en Inde ou en Allemagne !),… Cela fait partie de la préparation du négociateur : ne pas être surpris, à court d’argument et de répartie.

Quel type de négociation est requis dans notre cas ? L’auteur résume les situations en 4 familles : la coordination tacite (accord qui fait appel aux réflexes et instincts des participants), la transaction, le partenariat et la mutualisation d’intérêts (objectifs partagés à atteindre). Il résume cela par un schéma relativement parlant :

 

Elevés

Faibles

Conflits et enjeux

Exigences relationnelles dans le temps

Elevées

mutualisation d’intérêts

partenariat

Faibles

transaction

coordination tacite

 

On pourra donner comme exemples :

  • Pour la mutualisation d’intérêts, une fusion de 2 entreprises.
  • Pour le partenariat, un projet en équipe.
  • Pour la transaction, une discussion « âpre » sur un marché au sujet du prix des salades !
  • Pour la coordination tacite, le processus d’atterrissage d’un avion (accord du contrôleur,…).

Se situer dans l’univers de la négociation c’est donc un pré-requis à l’atteinte de nos objectifs.

Enfin le rapport de force constitue un élément essentiel de la négociation : savoir qui a « la main » permet d’envisager la négociation sous le bon angle d’attaque. On distingue trois types de rapports de force :

–          Positif : celui qui nécessite le moins d’aboutir à un résultat  a le plus de marge de manœuvre.

–          Négatif : celui qui craint le moins de ne pas aboutir à un résultat  a le plus de marge de manœuvre.

–          Normatif : celui qui s’accorde le plus aux normes et aux règles a le plus de marge de manœuvre.

C’est uniquement ce premier « débroussaillage » terminé que l’on pourra réellement envisager notre négociation et son aboutissement. Passons donc aux bonnes pratiques de la négociation selon Richard Sell.

 

La méthode Richard Sell

Très pragmatique et pédagogue, l’auteur nous liste les points essentiels qui constituent une BONNE méthode de négociation. Il nous fait part ici de son expérience forte des situations dans ce domaine.

La préparation et le point de vue adverse : il faut clairement faire un état des lieux de la situation rencontrée, en termes d’attentes, de résultats et d’exigence de relation sur le long terme pour franchir le premier pallier. Le type de négociation est bien sûr à déterminer ainsi que le point de vue de l’adversaire. Car les négociateurs à succès sont d’abord ceux qui voient « le monde comme le voit la personne qu’ils essaient d’influencer ». La méthode de communication à adopter est un autre point à étudier : en face à face ou par mail, par téléphone ou par courrier,… Les échanges ne sont pas les mêmes ! Par mail on laissera par exemple un temps de réflexion plus long et donc moins de pression au destinataire. On perdra par contre la « chaleur » du contact présente en face à face…Enfin les 1ères questions à poser sont à écrire noir sur blanc pour préparer son accroche et se construire une base pour construire sa stratégie.
Le processus de recherche d’information intervient logiquement à la suite de la préparation : à la fois en amont de la négociation mais surtout au cours de celle-ci il faut prendre un mode interrogatif de manière à déceler tous les enjeux et toutes les attentes de la partie adverse. On cherchera donc à établir un rapport, un lien avec notre interlocuteur au cours de la discussion, puis à le questionner tout en tentant de déceler les rapports de force les plus visibles (signaux dans la communication verbale et non-verbale).

Le terrain d’entente : pour trouver un accord, nous dit Richard Sell, il faut un terrain d’entente. Et cela parait d’ailleurs logique. Cherchons alors les références, les normes, les règles et expertises que l’on peut partager avec notre interlocuteur ou du moins qui nous parlent. Cela mettra en place des points d’accroche, essentiels par la suite. Les méthodes proposées ici sont d’identifier le décisionnaire, de chercher à répondre à nos objectifs tout en servant notre intérêt, d’envisager une réponse négative pour comprendre les attentes adverses et enfin de tenter de faire converger tous les objectifs vers une option « low cost » idéale, pas évidente sans préparation bien évidemment !

Les objectifs de la négociation : une seule chose à dire, ils doivent être ambitieux, car on s’adapte généralement aux barrières que l’on s’est fixé et l’on sera toujours moins déçu en partant de haut que tout en bas ! De plus le rapport de force préalable qui peut exister entre deux partis est avant tout conceptuel : il peut facilement être inversé dans notre imagination J.

On devrait donc aboutir à une zone d’acceptation, qui se compose d’une limite basse à ne surtout pas dépasser (c’est le minimum syndical !) ainsi que d’un objectif idéal.

A vous de jouer !

 

Les pièges de la négociation

Eh oui qui dit vente et argent dit aussi astuces et même pièges pour les plus vicieux. En plus cela passe bien souvent inaperçu, si bien que l’on détecte difficilement  une situation illicite, en particulier lors de son déroulement. L’auteur de Bargaining for advantage nous propose donc une liste non exhaustive de ces méthodes douteuses qui font le bonheur de certains commerciaux !

La sur-enchère

Cette méthode consiste à sur-argumenter son plan de bataille puis à délaisser certaines exigences pour faire croire à une certaine souplesse et à de faux efforts d’adaptation. On donnera par exemple 3 volontés, au premier abord essentielles pour orienter l’argumentaire vers une seule des 3, évidemment celle qui nous intéresse vraiment en faisant mine de délaisser les autres par collaboration et pour faire avancer le débat. C’est donc à celui qui aura le plus d’arguments – recevables – que reviendra la victoire !

Les stéréotypes Homme/Femme

Attention on touche ici un point sensible, les rapports hommes/femmes dans les démarches commerciales ! On peut avoir le cas d’une femme « seule » dans un univers exclusivement masculin. Bien souvent la femme sera traitée avec plus d’égard et pourra donc jouer un rôle fort dans la négociation tandis qu’un homme de son parti jouera lui le rôle de « bouclier » en acceptant de recevoir tous les coups.

On peut également rencontrer une situation opposée où un homme « vantera » le manque de fermeté des femmes dans les négociations. Bien souvent le résultat est une trop grande fermeté ou au contraire une perte de confiance des femmes qui mène à une performance médiocre.

Attention donc aux préjugés !

Le mauvais gars et le bon gars

Quand quelque chose va mal, on tente bien souvent de se raccrocher à ce qui va bien, on positive. C’est sur cette réaction commune que se joue cette tactique « frauduleuse » : en jouant décemment le rôle du négociateur trop dur et agressif, c’est l’ « acteur » plus tendre mais pas pour autant facile en affaire qui va recueillir les voix et imposer ses choix. Cette méthode d’équipe est facile à mettre en œuvre et il faudra une vigilance certaine pour ne pas se laisser aller trop facilement vers son instinct !

Le piège à rat

En faisant dire « oui » à une affirmation banale en début de négociation, le commercial avisé trouvera plus tard un point d’accroche irréfutable à son argumentation qui repose en réalité sur cette affirmation pour être validée. L’interlocuteur ne pourra donc plus faire machine arrière et le piège se sera refermé sur lui.

Le syndrome de rareté

Cette méthode également nommée méthode de « clôture » intervient comme son nom l’indique en toute fin de négociation. On va provoquer une montée rapide du prix de vente grâce au phénomène de compétition entre plusieurs acheteurs (rareté du produit), grâce à un temps limité ou encore grâce un départ précipité qui provoque souvent une chute brutale des exigences adverses. Il est donc essentiel de garder son cap dans les négociations.

Le « lowballing »

On va jouer ici sur le niveau de désir de l’acheteur potentiel. On se rapproche ainsi de la méthode précédente. Le principe est le suivant : le vendeur va baisser ses exigences jusqu’à atteindre un intérêt fort de la part du client, puis lorsque le désir s’est formé dans l’esprit de celui-ci, il va alors faire remonter ces mêmes exigences par paliers. C’est notamment l’argument du prix « à prendre ou à laisser » qui aura bien évidemment augmenté si l’on revient le lendemain une fois que l’on a fait son choix…

La guerre des prix

Encore une petite magouille « sympathique » : cela fonctionne en équipe. En proposant tour à tour et de manière individuelle un prix d’achat de plus en plus faible mais à la base inférieur au prix proposé, le vendeur pourra alors douter de son prix de vente et accepter au final la proposition du 1er vendeur finalement pas si « malhonnête » en apparence comparée aux autres propositions indécentes. Les liens entre les acheteurs sont bien évidemment solidement dissimulés d’où la difficulté parfois de découvrir une telle supercherie !

Les poupées russes

Ce que l’on emballe dans une grande poupée a une valeur financière moindre que notre achat initial. On part donc d’un point de comparaison haut qui est trompeur et peut parfois nous pousser à acheter des choses que l’on n’aurait pas acceptées seules. C’est le cas par exemple de l’assurance chère en soi mais qui est souvent négligeable en comparaison du prix de la télé LED que l’on vient d’acheter. Alors pourquoi pas ?… L

Et vous quelles sont vos techniques illicites préférées ??

 

Et l’éthique dans tout ça ?

Le livre termine sur une note originale, en abordant l’éthique des négociations.

De manière à ne pas sombrer dans le « côté obscur de la force » de la négociation, un des meilleurs moyens consiste à faire fonctionner son réseau social. Ou s’il n’est pas suffisamment fourni, à le développer !

En créant des relations durables on facilite les échanges et on limite les risques de bras de fer en trouvant des terrains d’entente « gagnant-gagnant », où les partenaires s’y retrouvent.

En affichant ses intentions clairement à ses proches avant une négociation, on pourra également éviter de sombrer dans ce monde de manipulation et de mensonge tant redouté ! On tentera effectivement de se tenir à ses engagements, plus facilement que si l’on avait uniquement des comptes à rendre à soi même. Une autre manière d’envisager les choses dans le même objectif consiste à imaginer que l’on négocie pour un(e)  ami(e). Cela implique un respect de ses valeurs et cela conduit donc à un plus haut niveau de respect dans la négociation.

Je terminerai ce paragraphe en citant l’exemple de J.P. Morgan, fondateur de la banque américaine du même nom, qui, lors d’une affaire, rectifia une erreur de calcul d’un prix de vente (sous-estimé) en apportant la somme réelle au grand industriel Andrew Carnegie. En acceptant une « perte » de 10000 $ c’est une relation long terme et un partenaire fort que J.P. Morgan s’était créé. Le jeu en valait vraiment la chandelle au vu des transactions futures passées entre les 2 hommes.

Pour éclaircir ce domaine de l’éthique dans les affaires commerciales, Richard Shell trace 3 profils de négociateurs : les adeptes du poker, les idéalistes et les pragmatiques. Les noms parlent d’eux-mêmes et on comprend rapidement que l’auteur veut nous orienter vers le profil qui nous semble le plus juste à nos yeux, une fois que l’on connaît celui qui nous décrit aujourd’hui.

Entre sens du devoir de vérité (idéalistes), bluff (adeptes du poker) et fausse collaboration (pragmatiques), il faut trouver son chemin et tenter de s’y tenir !

Pour éviter les mésaventures et les provocations « malhonnêtes » voici donc quelques trucs qui permettront de se tenir à sa ligne de conduite : retourner une question vers son adversaire si la réponse que l’on devait apporter se situe sur un « terrain glissant »,  orienter la discussion sur des faits que l’on sait avérés et divulguables, se faire aider d’une tierce personne pour assurer un niveau minimal de respect mutuel ou encore se tenir à des promesses que l’on pourra tenir.

 

Conclusion : si vous cherchez une vision révolutionnaire de la négociation, passez votre chemin, ce résumé suffira amplement ! Par contre lire Bargaining for advantage peut clairement aider à revoir les bases d’une négociation bien amenée et construite qui mène à la réussite de ses objectifs tout en adoptant une ligne de conduite respectable. Il pourra très bien faire l’affaire d’un pack « Argumentation pour les nuls » en complément d’un bouquin traitant de psychologie comme Comment se faire des amis de Dale Carnegie.

2 pensées sur “La négociation : Bargaining for advantage, de G. Richard Sell

  • Ping : Conversations cruciales - Mon-personal-MBA

  • 8 mars 2017 à 20 h 12 min
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